Des plantes résistantes à un inhibiteur clé, ayant une forte influence sur le mécanisme de la croissance cellulaire, ont été découvertes par une équipe du BIAM. Un atout pour une meilleure compréhension de la régulation de la croissance des plantes, avec des implications potentielles tant dans le secteur de la sécurité alimentaire que celui du traitement de maladies inflammatoires et de cancers.
L’étude des kinases, qui sont présentes chez des organismes aussi différents que les humains et les plantes, offre une approche universelle pour mieux comprendre les maladies liées à un dérèglement de la prolifération cellulaire. Les kinases sont des actrices cruciales de l’activité cellulaire organisées en voies ou cascades de signalisation. Pour mieux comprendre le rôle des kinases dans ce fonctionnement complexe, les scientifiques étudient les réactions propres des kinases et les conséquences cellulaires associées lorsqu’elles sont mises en présence d’inhibiteurs (molécules pharmacologiques qui neutralisent sélectivement l’action de leur cible). Benoît Menand et Marie-Hélène Montané, chercheurs au sein du BIAM, étudient plus particulièrement la kinase TOR (Target of Rapamycin) qui pourrait être définie comme le véritable chef d’orchestre de la prolifération des cellules et de la différenciation cellulaire.
Pour le démontrer, les scientifiques ont dû rechercher l’action de l’inhibiteur AZD-8055 au cœur du végétal. Pour cela, ils ont sélectionné des plantes résistant à cet inhibiteur afin d’y mesurer des marqueurs de croissance associés à cette résistance comme le développement des racines, l’activité de la photosynthèse et la phosphorylation (cf. Encadré) de protéines spécifiques. Le résultat de ces mesures a été catégorique, confirmant le rôle de régulateur de la kinase TOR dans ces processus. « Il faut garder à l’esprit que TOR, comme beaucoup de kinases, est présente dans les cellules végétales mais aussi animales où elle y joue une fonction similaire. L’approche pharmacogénétique que nous avons développée chez les plantes est probablement valide pour les cellules animales ou les algues. Cette découverte est donc décisive pour différents secteurs de la recherche », soulignent d’une seule voix les scientifiques.
En effet, comprendre ces mécanismes fondamentaux favorise les recherches sur les stratégies d’adaptation de la croissance des plantes face aux maladies et aux stress environnementaux. Mais le résultat et l’impact de ces travaux, qui mettent en œuvre une approche pharmacogénétique, ne s’arrêtent pas là : révéler les arcanes de la régulation des activités de la kinase TOR pourrait favoriser également les recherches sur les traitements contre différentes formes de cancers ou de maladies inflammatoires. Encore un exemple majeur de l’importance du soutien à la recherche fondamentale.
La phosphorylation est un processus réalisé par les kinases, qui transfèrent un groupe phosphate d’une molécule à une protéine ciblée ce qui modifie sa structure activant ou réprimant ainsi son fonctionnement dans la cellule.
La phosphorylation peut déclencher une cascade de réactions cellulaires, activant ou réprimant des protéines spécifiques afin de réguler des processus biologiques comme la croissance cellulaire, le métabolisme, la communication intercellulaire et même la réponse aux hormones ou des facteurs de croissance.
Auteurs
Romain Perdoux, Adam Barrada, Manal Boulaiz, Camille Garau, Clément Belbachir, Cécile Lecampion, Marie-Hélène Montané, Benoît Menand
Références
The Plant Journal: A drug-resistant mutation in plant target of rapamycin validates the specificity of ATP-competitive TOR inhibitors in vivo
Vers le site de la Direction de la Recherche Fondamentale du CEA…