Alcasun, la révolution biosourcée : Entretien exclusif avec le Lauréat
Alcasun est un projet de création de startup en biotechnologies qui vise le marché du cosmétique, de la chimie verte et des bioénergies. Les fondateurs de cette future startup sont en effet parvenus à isoler une enzyme d’algue capable, en présence de lumière bleue, de convertir les acides gras en hydrocarbures (ou alcanes) utilisables en cosmétique. Son ambition est d’apporter à cette industrie des composés biosourcés et écologiques. Alcasun s’inscrit ainsi dans le développement d’une production alternative d’alcanes issues de substrats formés à partir de la fixation de CO2 atmosphérique.
Le Grand Prix I-PhD récompense la démarche de jeunes scientifiques qui souhaitent transformer leurs découvertes en projets innovants à impact élevé par la création d’une startup. Ce concours national, organisé dans le cadre du programme d’investissement de l’État France 2030, les encourage ainsi à valoriser leurs travaux de recherche par l’entrepreneuriat. Le projet Alcasun est à la fois récompensé pour l’originalité de cette innovation et pour son potentiel de réponse aux défis environnementaux et industriels.
Interview :
Vous venez de remporter le Grand Prix i-PhD pour votre projet de startup Alcasun. Pouvez-vous nous expliquer ce qui rend votre technologie si unique ?
Nous proposons un procédé biotechnologique qui repose sur une enzyme découverte au sein du BIAM, l’acide gras photodécarboxylase. Cette enzyme permet de produire des alcanes, qui sont des molécules essentielles en cosmétique en tant qu’émollients ou solvants. Contrairement aux procédés classiques, qui sont très énergivores et dépendre de ressources fossiles, notre technologie utilise des huiles végétales, offrant ainsi une alternative biosourcée. C’est cette innovation nous distingue, tant par son faible impact environnemental que par la haute qualité des molécules produites.
Où en est aujourd’hui le développement de votre startup ?
Nous sommes en phase de maturation technologique et de validation du marché. Grâce au programme Magellan du CEA, nous travaillons actuellement sur une preuve de concept visant un passage au niveau de maturité technologique TRL5*. Cela nous permettra de démontrer la faisabilité industrielle de notre procédé avant d’entrer pleinement sur le marché.
Quelles sont vos perspectives à la fois scientifiques et industrielles ?
Scientifiquement, les enzymes comme celle que nous utilisons ouvrent la porte à la production de molécules complexes que la chimie traditionnelle ne peut synthétiser. À l’avenir, nous voulons explorer d’autres applications de ces enzymes pour développer des molécules à haute valeur ajoutée, notamment pour l’industrie pharmaceutique. L’optimisation de ces biocatalyseurs pourrait transformer plusieurs secteurs en remplaçant les procédés chimiques polluants par des solutions plus vertes et efficientes.
Votre technologie trouve des applications en cosmétique. Existe-t-il d’autres secteurs potentiellement intéressés ?
Absolument. En fonction de la longueur des chaînes d’hydrocarbures produites, nos molécules peuvent aussi être utilisées dans l’industrie chimique, par exemple comme solvants pour les peintures, ou même dans le domaine des carburants. Nous envisageons notamment des applications comme le bio-kérosène, une alternative renouvelable aux carburants fossiles.
Quel rôle a joué la recherche fondamentale dans votre parcours jusqu’à ce prix ?
La recherche fondamentale a été déterminante ! La découverte de l’enzyme que nous utilisons est directement issue de travaux de recherche fondamentale au CEA. Sans cette base, il aurait été impossible de comprendre et d’optimiser l’activité de cette enzyme pour en faire un outil industriel. Ce prix est donc une reconnaissance de l’importance cruciale de la recherche fondamentale dans l’innovation biotechnologique.
Enfin, comment voyez-vous l’avenir d’Alcasun ?
L’avenir est prometteur. Nous continuons à perfectionner notre technologie pour atteindre une preuve de concept suffisamment représentative de l’échelle industrielle. À terme, nous espérons que notre procédé deviendra la référence pour la production d’alcanes biosourcés, non seulement en cosmétique mais aussi dans d’autres secteurs industriels. Nous voulons contribuer activement à la transition écologique en offrant des solutions durables et innovantes.
TRL5* : Technology Readiness Level est une échelle utilisée pour évaluer la maturité d’une technologie en développement, allant du stade initial de recherche fondamentale (TRL 1) jusqu’à une technologie entièrement opérationnelle (TRL 9). L’échelle 5 se situe dans la phase intermédiaire du développement et marque une avancée importante, avec des tests plus poussés et des résultats encourageants, bien que la technologie ait encore des étapes à franchir avant d’être entièrement déployée.
En savoir plus sur le projet de recherche fondamentale Photoalkane :